On parle souvent des salaires à Genève comme d’une fierté.

Comme si, ici, tout le monde vivait confortablement.

Comme si, ici, l’argent circulait en abondance.

Comme si, ici, la qualité de vie était garantie par le simple fait d’habiter dans le canton.

Mais il suffit de comparer deux personnes, deux familles, deux vies, pour comprendre que la réalité est plus complexe.

D’un côté, un travailleur qui vit à Genève.

De l’autre, un frontalier qui traverse la frontière chaque matin.

Ils ont le même salaire.

Ils font le même métier.

Ils prennent le même bus, ou parfois travaillent dans le même atelier, le même service, la même entreprise.

Mais leurs vies n’ont rien à voir.

Le coût du logement : un gouffre qui sépare deux mondes

En Suisse, un appartement de 3 pièces peut coûter entre 2’000 et 2’800 CHF par mois.

Et encore, s’il est trouvé après des mois de recherche.

Pour une famille avec enfants, on dépasse facilement 3’500 CHF.

Et dans certains quartiers, on frôle 4’000 CHF.

Pendant ce temps, à 15 minutes de route côté français, pour le même prix, on parle :

  • d’une maison individuelle
  • avec jardin
  • garage
  • parfois piscine
  • parfois vue sur les montagnes

Et ce n’est pas une caricature.

C’est la réalité de centaines de foyers chaque année.

À salaire égal, le frontalier peut acheter.

Le résident, lui, paie un loyer qui ne cesse de monter.

Le panier de courses : deux tickets, deux mondes

Le coût de la vie suisse est proportionnel au logement : élevé, très élevé.

Alimentation, services, santé, loisirs, transports : tout demande une organisation, des choix, parfois des sacrifices.

Pendant ce temps, à quelques kilomètres :

  • courses en supermarchés 40% moins cher
  • essence 30 à 50% moins cher
  • sorties familiales divisées par deux
  • soins dentaires jusqu’à trois fois moins cher

Ce n’est pas « mal » ou « bien ».

C’est un fait économique.

Et ce fait crée une inégalité silencieuse :

Le salaire suisse n’a pas la même valeur selon l’endroit où il est dépensé.

Une même journée, deux fatigues différentes

Le frontalier se lève tôt, souvent très tôt.

La route est longue.

Les bouchons sont réels.

Mais le soir, il rentre dans un espace plus grand, plus calme, plus abordable sans consommer dans la ville qui l’emploie.

Le Genevois, lui, se lève aussi tôt.

Travaille autant.

Mais rentre dans un logement plus petit, plus cher, parfois trop exigu pour respirer.

Le frontalier rentre chez lui.

Le résident reste dans un marché qui ne lui laisse pas de répit.

L’accumulation crée une fracture sociale invisible

Ce n’est pas une jalousie.

Ce n’est pas une colère.

C’est une question d’équilibre.

Lorsqu’une partie importante des personnes qui travaillent dans un pays n’y consomment pas,

n’y habitent pas,

n’y investissent pas,

alors la ville se vide doucement de sa propre population.

Les loyers montent.

Les logements deviennent des objets de compétition.

Les commerces vivent des passages, pas des habitués.

Les cafés se vident après le travail.

Les villages se transforment en couloirs de transit.

Genève travaille.

Mais Genève ne se vit plus.

Ce qui est en jeu, ce n’est pas l’autre. C’est notre avenir.

Ce blog n’est pas un appel contre les frontaliers.

Ce sont des travailleurs, des familles, des gens.

Ils profitent d’une opportunité.

C’est normal.

On ferait la même chose.

Le problème n’est pas la personne.

Le problème est le système.

Un système où :

  • Le salaire est suisse
  • Le coût de la vie est suisse
  • Mais la consommation est ailleurs

Dans ce système, celui qui vit ici s’appauvrit,

pendant que celui qui vit ailleurs optimise.

Ce n’est pas une critique.

C’est une constatation économique.

Et que devient celui qui habite Genève ?

Il travaille.

Il paie.

Il ajuste.

Il renonce.

Il serre les dents.

Et il se demande :« Comment se fait-il que, avec un  salaire suisse, je n’arrive pas à vivre aussi bien que quelqu’un qui traverse la frontière ? »

Cette question est légitime.

Elle doit être posée.

Elle doit être entendue.

Parce qu’un pays qui appauvrit ceux qui y vivent perd son sens.

Parce qu’une ville qui n’est plus habitable pour ceux qui y travaillent perd son âme.

Conclusion : Repenser l’équilibre, pas désigner un ennemi

La solution n’est pas la fermeture.

La solution n’est pas le conflit.

La solution n’est pas l’accusation.

La solution est le rééquilibrage.

  • Embaucher local
  • Consommer local
  • Former local
  • Construire des loyers accessibles
  • Redonner une place à ceux qui vivent ici

Parce que l’avenir d’une ville appartient à ceux qui y dorment, qui y vivent, qui y élèvent leurs enfants.

Genève n’a pas besoin d’être plus brillante.

Elle a besoin d’être vivable.

Et la vivabilité, elle se construit ici,

avec ceux qui y sont,

pas en dehors.

Ajout : La contradiction économique

C’est vrai.

Les chantiers tournent.

Les grues ne s’arrêtent jamais.

Les entreprises cherchent du personnel.

Mais une question essentielle n’est presque jamais posée :

Construire pour qui ?

Aujourd’hui, à Genève, on construit :

  • des immeubles de rendement,
  • des appartements à 2’800 / 3’800 CHF par mois,
  • des projets pensés pour l’investissement, pas pour l’habitation locale.

Alors oui, la construction manque de bras.

Mais pour construire des logements que de plus en plus de Genevois ne peuvent plus s’offrir.

C’est une absurdité économique :

O demande aux Et si l’oncontinue ainsi, une autre question arrivera vite :

Qui va louer, si le local n’a plus d’emploi ?

Si la main-d’œuvre locale disparaît,

si les salaires stagnent,

si les loyers restent hors de portée,

si la ville n’est plus pensée pour ceux qui y vivent…

Alors Genève continuera d’exister, oui,

mais sans les Genevois.

Une ville sans habitants réels devient un décor économique, un lieu de passage, une vitrine.

Une ville où l’on travaille, mais où l’on ne vit plus.

La situation n’appelle pas au conflit.

Elle appelle à la cohérence.

  • On ne peut pas dire qu’il manque de main-d’œuvre tout en écartant la main-d’œuvre locale.
  • On ne peut pas construire des logements que ceux qui vivent ici ne peuvent pas payer.
  • On ne peut pas faire tourner une économie sans ceux qui en sont la base.

Embaucher local, c’est maintenir l’équilibre.

C’est permettre aux habitants de vivre là où ils travaillent.

C’est donner du sens à la ville, à l’effort, au salaire, à la vie.

Parce qu’une ville ne se mesure pas à son PIB,

mais à sa capacité à être habitée.

Genève n’a pas besoin de plus de tours, de bureaux, de slogans.

Elle a besoin de gens qui y vivent.

Et pour cela, il faut redonner aux travailleurs locaux la place qu’ils n’auraient jamais dû perdre.

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